Politique
Déficit public : Bercy, Matignon, l’Élysée savaient… et n’ont rien fait

Les sénateurs Jean-François Husson (LR) et Claude Raynal (PS) n’y vont pas par quatre chemins. Les deux parlementaires alertent depuis des mois sur la situation budgétaire catastrophique de la France.
Lors de la conférence de presse de la #ComFinSénat sur la dégradation des finances publiques, @ClaudeRaynal et @jf_husson ont présenté leurs constats suite aux dernières auditions. pic.twitter.com/hJs01M9dRq
— Sénat (@Senat) November 19, 2024
Déficit public : des alertes ignorées dès 2023
Cette fois, un article de Public Sénat vient le confirmer. Dès décembre 2023, Bercy savait. Les notes internes, découvertes grâce au contrôle rigoureux du Sénat, étaient limpides : les recettes fiscales, notamment de la TVA, s’effondraient. Pourtant, aucune mesure n’est prise pour ajuster le tir. « Irresponsabilité budgétaire assumée » : c’est le verdict implacable du rapport. Bruno Le Maire et Thomas Cazenave, alors ministres de l’Économie et des Comptes publics, sont accusés d’avoir préféré taire l’ampleur de la crise plutôt que d’affronter le Parlement.
Pire, une note du 13 décembre 2023 montre que des solutions étaient sur la table, notamment une hausse de la fiscalité sur l’énergie. Mais Élisabeth Borne, alors Première ministre, aurait privilégié les négociations sur la loi immigration au détriment des finances publiques.
Le refus d’agir sur le déficit public pour des raisons électoralistes
Pourtant, l’année 2024 commence par une stratégie de communication déconcertante de la part du gouvernement. Bruno Le Maire annonce alors des objectifs de déficit irréalistes, tandis que Matignon multiplie les demi-mesures, comme un décret annulant 10 milliards d’euros de crédits en février. Puis, peu de temps après, le gouvernement décidait d’ajouter 16 milliards d’euros supplémentaires de crédits en dépenses en 2024.
Le Sénat n’épargne pas Gabriel Attal, qui a succédé à Élisabeth Borne. Il aurait, avec Emmanuel Macron, refusé de porter un projet de loi de finances rectificative (PLFR) indispensable pour corriger la trajectoire. Un choix motivé, selon les sénateurs, par des calculs électoraux à l’approche des européennes. « Une mystification et un manque de courage politique », fustige le rapport.
La dissolution, dernier acte d’une crise budgétaire
La décision d’Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale après les élections européennes est perçue comme la goutte d’eau qui a fait déborder le vase budgétaire. Selon le rapport, ce choix aurait repoussé encore davantage les mesures nécessaires, aggravant le déficit. Entre-temps, la France subissait une dégradation de sa note par Standard & Poor’s, un camouflet pour la réputation économique du pays.
Pour les sénateurs, ce sont des mois cruciaux qui ont été gaspillés, au détriment des comptes publics. Les conséquences sont aujourd’hui bien visibles : gel des retraites, baisse des remboursements de soins, et coupes drastiques dans les dépenses publiques.
Le rapport conclut avec sévérité : « Le sentiment d’irresponsabilité et de déni collectif a dominé à tous les niveaux de l’exécutif. Les citoyens paient aujourd’hui le prix de ces décisions tardives, incohérentes et avant tout politiques. »
Les sénateurs sonnent l’alarme, l’exécutif contre-attaque
Alors que le gouvernement tente de limiter les dégâts, cette gestion du déficit laisse planer l’ombre d’un scandale d’État. L’affaire pourrait bien rebondir dans les mois à venir, poussant les responsables politiques à s’expliquer devant les Français, voire devant la justice.
Face au rapport cinglant du Sénat sur le dérapage historique du déficit public, Bruno Le Maire n’a pas tardé à réagir. L’ancien ministre de l’Économie rejette en bloc les accusations portées contre lui, dénonçant un document « écrit par des opposants politiques, truffé de mensonges et d’approximations ». Une défense musclée qui, plutôt que de répondre aux faits, préfère disqualifier les auteurs du rapport.

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