Immigration
Traversées de la Manche : un réseau international de passeurs jugé à Lille

Le procès de 18 membres présumés d’un vaste réseau de passeurs s’est ouvert à Lille cette semaine. Ce groupe est soupçonné d’avoir orchestré les traversées clandestines de la Manche entre 2020 et 2022, facilitant ainsi le passage de milliers de migrants vers le Royaume-Uni. Principalement composé d’Irako-Kurdes, ce réseau est accusé d’avoir fonctionné comme une véritable entreprise criminelle, rapportant des sommes colossales grâce à l’exploitation de l’immigration clandestine.
Une organisation de passeurs bien rodée
D’après les enquêteurs, ce réseau de passeurs se démarque par sa structure hiérarchisée et son efficacité. Les membres du groupe géraient les traversées clandestines depuis le camp de Grande-Synthe (Nord), où les départs vers les côtes anglaises étaient minutieusement planifiés. Chaque embarcation transportant une cinquantaine de migrants rapportait environ 100 000 euros, une somme énorme qui témoigne de l’ampleur du trafic.
Les autorités décrivent un réseau transnational avec des ramifications aux Pays-Bas, en Turquie et en Belgique. L’achat des embarcations était effectué en Turquie, tandis que les moteurs et autres équipements nécessaires à ces dangereuses traversées étaient stockés aux Pays-Bas. La gestion logistique était telle qu’une simple nuit d’activité pouvait générer des revenus considérables pour les passeurs.
Des chefs de réseau aux logisticiens
Parmi les 18 prévenus, seuls 13 étaient présents au tribunal de Lille, les autres étant détenus en Belgique ou ayant vu leur procès renvoyé à une date ultérieure. L’un des principaux suspects est un Irakien de 26 ans, accusé d’avoir orchestré les traversées depuis sa cellule de prison en France, notamment à Tours et au Havre. Il aurait joué un rôle central dans l’organisation des départs de migrants vers le Royaume-Uni. Ce dernier a été expulsé de l’audience après avoir insulté et menacé les interprètes.
BFMTV rapporte que selon les avocats de la défense, la plupart des prévenus seraient de simples “petites mains” dans ce vaste réseau. « On n’a sans doute, comme d’habitude, que des petites mains », déclare Me Kamel Abbas, avocat d’un des accusés. « Il y a peut-être des lieutenants, mais des chefs de réseau, vu les circonstances d’interpellation, je n’y crois pas. »
Un procès aux enjeux européens
Ce procès fait suite à une vaste opération internationale menée le 6 juillet 2022 par la France, la Belgique, l’Allemagne, les Pays-Bas et le Royaume-Uni. Coordonnée par Europol et Eurojust, cette opération avait conduit à l’arrestation de 39 personnes et à la saisie de 1 200 gilets de sauvetage, 150 bateaux pneumatiques, 50 moteurs de bateaux, ainsi que des armes et de la drogue. Les perquisitions menées avaient permis de démanteler l’une des plus importantes organisations de passeurs opérant en Europe.
Ce réseau, qui a profité de l’afflux de migrants en provenance du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, avait réussi à imposer son contrôle sur les traversées de la Manche. Malgré les efforts des autorités européennes pour endiguer le phénomène, les traversées en “small boats” continuent d’augmenter. Depuis le début de l’année 2024, plus de 25 000 migrants ont réussi à atteindre les côtes britanniques, malgré les nombreux naufrages qui ont fait de cette année la plus meurtrière pour ces traversées depuis 2018.
Le trafic des passeurs toujours actif
Malgré ce procès, il semble que le démantèlement complet de ces réseaux reste un défi pour les forces de l’ordre. Les opérations policières, bien qu’efficaces, ne parviennent pas à éradiquer totalement le phénomène. De nouveaux passeurs remplacent rapidement ceux qui sont arrêtés, et les migrants continuent de risquer leur vie pour traverser la Manche.
En conclusion, ce procès à Lille est une étape cruciale dans la lutte contre l’immigration clandestine et les réseaux de passeurs, mais il souligne également l’ampleur du défi auquel les autorités européennes sont confrontées. Le trafic de migrants reste un fléau difficile à éradiquer, et les efforts pour stopper ces traversées dangereuses devront se poursuivre bien au-delà de ce procès.
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